L’agence des Etats-Unis pour le développement international (USAID), en charge de plus de la moitié du financement de la reconstruction en Haïti après le séisme du 12 janvier 2010, a obtenu des résultats mitigés dans la plupart des activités de reconstruction qu’elle a menées. Ainsi, elle a décidé d’étendre pour trois ans ses activités liées à la reconstruction. C’est la conclusion d’un rapport émanant du « Government Accountability Office (GAO) », l’organisme d’audit, d’évaluation et d’investigation du Congrès américain, l’équivalent de la Cour des comptes dans certains pays.
« L’USAID a réduit les résultats prévus pour 5 des 6 principales activités d’infrastructure et a rencontré des retards dans 4 de ces activités, y compris l’amélioration de certains ports. L’USAID a également réduit les résultats prévus pour 3 des 17 principales activités d’appui aux services de base, y compris l’accès aux soins de santé de base », constate ce rapport produit à la demande du Congrès, de mars 2014 à juin 2015, et dans lequel le GAO a passé en revue 23 activités de l’USAID, chacune avec des allocations dépassant 10 millions de dollars.
Les responsables de la mission de l’USAID en Haïti ont indiqué aux auditeurs du GAO que les facteurs qui affectent les résultats et qui provoquent des retards sont des effectifs insuffisants, des plans initiaux irréalistes et la faible capacité technique et budgétaire du gouvernement haïtien. En conséquence, l’USAID a augmenté son personnel et a étendu ses activités liées à la reconstruction pour 3 ans, jusqu’en octobre 2018.
Selon le GAO, l’USAID avait initialement prévu d’allouer 72,5 millions de dollars pour construire un nouveau port dans le couloir du Cap-Haïtien et de compléter des améliorations moindres au port existant du Cap-Haïtien. Après confirmation, à la fin de 2013, que les entités du secteur privé concernées n’avaient aucun intérêt à soutenir la construction d’un nouveau port dans le nord d’Haïti, l’USAID a recentré son activité sur une plus large réhabilitation du port existant de Cap-Haïtien pour 70,5 millions de dollars.
Le rapport précise que ce n’est pas le seul chantier que l’USAID a dû abandonner dans la région. En effet, l’USAID a suspendu puis annulé l’expansion de la capacité de la centrale électrique du Parc industriel de Caracol (PIC). Les responsables de la mission du GAO ont déclaré que des facteurs tels que le manque de personnel avec une expertise en ingénierie, une planification irréaliste, et les changements de conception du gouvernement haïtien ont contribué au gonflement des coûts ainsi qu’à des retards.
De plus, la mission du GAO rapporte que lors de sa visite du PIC en juin 2014, elle a observé des préoccupations non résolues telles que des tuyaux de drainage bloqués et des fossés qui ont provoqué des inondations dans le village après de fortes pluies, et des égouts écrasés. Après qu’une évaluation indépendante a révélé des lacunes dans le travail de construction du site du PIC, le rapport affirme que l’USAID a versé 3 millions de dollars à une firme en octobre 2014 pour évaluer les problèmes de ce site en vue d’aider à déterminer comment y remédier. L’expertise a énuméré des problèmes de drainage, de conduites d’eau mal conçues, des réservoirs d’eau mal installés, des tuyaux d’égout insalubres, et les lumières de sécurité solaire non fonctionnelles.
Un peu plus loin dans ce rapport, une autre contreperformance de l’USAID est signalée. Il s’agit du projet « Feed the Future North », lancé en avril 2013 dans le Nord, à hauteur de 87,8 millions de dollars, afin d’améliorer notamment la productivité agricole dans le couloir du Cap-Haïtien. « Cette activité en cours a atteint ou dépassé son objectif de 13% de ses indicateurs de performance […]», rapporte le GAO tout en précisant que, selon les responsables de l’USAID, l’activité a dû affronter deux saisons de sécheresse et de la difficulté à trouver du personnel ayant les compétences nécessaires qui était prêt à se déplacer vers le nord d’Haïti pour gérer l’activité.
Ce rapport, le GAO-15-517, rendu public le 3 juin 2015, examine les allocations et les décaissements effectués par l’USAID dans le cadre du financement de la reconstruction; les progrès dans la mise en œuvre des activités de reconstruction ; ainsi que les efforts de l’USAID pour assurer la durabilité de ces activités. Il recommande, entre autres, à l’USAID d’effectuer des analyses de durabilité pour chacune de ces activités d’infrastructure dès leur conception.
L’USAID, dépositaire de la moitié du financement de la reconstruction (2,7 milliards de dollars), a dirigé notamment ses efforts vers des secteurs tels que l’énergie, le logement, les ports, l’éducation et la sécurité alimentaire. Patrick St Pré Le Nouvelliste
